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La chronique
de Lionel Maumary

Almanach des migrations

Un Traquet oreillard estivant en Valais

Lionel Maumary, Oiseaux.ch, 15.07.2014

Du 9 au 13 juillet 2014 au moins, une femelle de Traquet oreillard (Oenanthe hispanica) a été observée à Chamoson VS, au pied de la grande falaise du Sex de Gru. Handicapée par la mue des rectrices et des rémiges, elle était probablement en train d'estiver en Valais central. La différence de coloration entre les nouvelles et anciennes rémiges indique qu'il s'agit probablement d'un individu de 2e année. C'est la première donnée de juillet en Suisse de cette espèce méditerranéenne qui n'avait jamais été observée en migration postnuptiale.


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L'aire de nidification du Traquet oreillard est restreinte au pourtour des mers Méditerranée, Noire et Caspienne. La sous-espèce nominale se trouve au Maghreb, dans la péninsule Ibérique, sur la côte méditerranéenne française et italienne, remplacée par O. h. melanoleuca des côtes de l'Adriatique à celles de la mer Caspienne. Avec plus de 550'000 couples, l'Espagne héberge 80 % de la population européenne (Russie non comprise). L'aire d'hivernage se situe exclusivement dans la ceinture sahélienne.

En Suisse, l'espèce apparaît irrégulièrement au printemps, surtout en Valais où près de la moitié des observations ont été effectuées. Les autres mentions proviennent principalement du fond des vallées alpines du Tessin, des Grisons de Glaris ainsi que du Plateau vaudois, bernois et zurichois ; la seule donnée de l'arc jurassien provient de Lauwil BL. Sur 13 observations où la sous-espèce a pu être déterminée, il s'agissait dans 11 cas de O. h. hispanica et 2 de O. f. melanoleuca, indiquant que ces Traquets oreillards proviennent plus souvent du sud-ouest de l'Europe que du sud-est ; sur les 18 mâles observés, 12 étaient du morphe stapazin (à gorge noire).

Toutes les données précédentes sont comprises entre le 29 mars et le 24 juin, dont la moitié entre la dernière décade d'avril et la première de mai. La seule mention automnale du 30 novembre 1975 ayant été mise en doute car se rapportant peut-être à un Traquet pie Oenanthe pleschanka, dont les apparitions sont régulières en Europe occidentale à cette période.

Les populations de la péninsule Ibérique, de France et d'Italie sont en déclin : au cours du XXe siècle, la Savoie et la quasi-totalité de la région Rhône-Alpes ont été abandonnées ; dans le Vaucluse, l'espèce régresse devant la reforestation des massifs, et il en est probablement de même pour les autres départements méditerranéens, ainsi que dans les Causses. L'espèce a été observée en Suisse pour la première fois en 1951 et n'a été observée que trois fois par la suite avant 1980, alors qu'elle est apparue en moyenne une année sur deux par la suite ; la première femelle est apparue en 1995. L'augmentation du nombre d'observations en Suisse, notamment dès 1983, s'oppose à cette tendance, et a probablement pour origine le réchauffement climatique en cours, incitant les jeunes à rechercher de nouveaux territoires plus nordiques.

Le Traquet oreillard habite les terrains rocailleux dénudés ou à végétation rase, avec quelques buissons et arbustes, comme des garrigues à chênes verts, plateaux rocheux, steppes caillouteuses ou vignobles. Les migrateurs observés en Suisse font généralement escale dans les labours, les champs cultivés, le long de clôtures bordant les chemins agricoles, en Valais central dans les steppes caillouteuse ou dans des vignes ; exceptionnellement, un oiseau a été observé à 1'990 m d'altitude dans la lande alpine à arbrisseaux nains. Diurne et solitaire, le Traquet oreillard se tient généralement au sol ou sur des rochers, mais se perche aussi volontiers sur des piquets ou des arbres ; il se nourrit principalement d'insectes gastéropodes Gasteropoda et d'araignées prélevés en sautillant à terre.

Le déclin du Traquet oreillard est imputable d'une part à l'intensification des pratiques agricoles et, d'autre part, aux sécheresses récurrentes dans les quartiers d'hiver du Sahel.



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